rak : la Française Mélina Boughedir condamnée à la perpétuité pour son appartenance à Daech
Son procès était « expéditif » et n’a « en aucun cas » respecté ses droits à la défense, affirme la Fédération internationale des droits de l’homme.
Source AFP
La Française Mélina Boughedir a été condamnée dimanche par un tribunal irakien à la prison à perpétuité pour appartenance au groupe djihadiste État islamique (EI), a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse. Libérable à l’issue d’un premier procès tenu en février sous l’accusation d’« entrée illégale » en Irak, la jeune femme a finalement été reconnue coupable dimanche en vertu de la loi antiterroriste, passible de la peine capitale.
La jeune femme de 27 ans, mère de quatre enfants, dont trois ont déjà été rapatriés en France, avait été déclarée libérable à l’issue d’un premier procès tenu en février sous l’accusation d’« entrée illégale » en Irak. « Je suis innocente », a-t-elle lancé au juge en français, tandis qu’un traducteur l’assistait. « Mon mari m’a dupée et ensuite il a menacé de partir avec les enfants », a-t-elle plaidé. En avril déjà, la cour centrale pénale de Bagdad avait condamné à la perpétuité une autre Française, Djamila Boutoutaou, 29 ans, qui avait affirmé avoir été elle aussi dupée par son mari.
Un procès expéditif
Son procès était « expéditif » et n’a « en aucun cas » respecté ses droits à la défense, a affirmé la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH). « L’Irak est certes un État souverain pouvant juger les ressortissants étrangers ayant commis des crimes sur son territoire, à condition évidemment qu’ils aient le droit à un procès équitable », relève Patrick Baudouin, avocat et président d’honneur de la FIDH, dans une réaction transmise à l’AFP. « Or le procès de Mélina Boughedir a été mené de manière expéditive », et « ne reconnaissait en aucun cas ses droits à la défense », poursuit Me Baudouin. L’avocat s’est par ailleurs ému des déclarations, en amont du procès, du ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian qui avait décrit jeudi Mélina Boughedir comme une « terroriste » de l’EI ayant « combattu contre l’Irak ».
En France, la jeune femme est visée par un mandat de recherche délivré dans le cadre d’une information judiciaire ouverte à Parisle 2 août 2016 pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle », selon une source judiciaire. Elle a été arrêtée durant l’été 2017 à Mossoul (Nord), ancienne « capitale » irakienne de l’EI, alors que son mari, lui aussi français, passe pour mort. Quelques dizaines de Français soupçonnés d’avoir rejoint l’EI sont actuellement retenus en Irak et en Syrie avec plusieurs dizaines de mineurs, d’après une source proche du dossier.
Une « terroriste de Daech »
En février, la cour pénale centrale de Bagdad avait ordonné la libération et l’expulsion de la jeune femme de 27 ans. Les juges avaient estimé qu’elle n’avait à répondre que d’« entrée illégale » en Irak et avaient prononcé une peine de sept mois, alors déjà purgée. Depuis, la Cour de cassation irakienne a ordonné un nouveau procès, cette fois-ci en vertu de la loi antiterroriste, qui prévoit la peine de mort pour appartenance à un groupe terroriste que l’accusé ait combattu ou non. Il existe de « lourdes interrogations sur les pressions qui auraient été exercées par la France pour provoquer un nouveau procès », affirme William Bourdon, avocat parisien de Mélina Boughedir qui a fait le déplacement à Bagdad.
Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait décrit Mélina Boughedir comme une « terroriste de Daech qui a combattu contre l’Irak » et appelé ce pays à la juger, tout en réitérant son refus de la peine de mort. La famille et la défense de Mme Boughedir plaidaient, elles, pour qu’elle rentre en France où « un juge d’instruction a signifié par un mandat d’arrêt qu’il souhaitait la voir dans son bureau », affirme Me Bourdon.