Trois nouveautés qui nous mettent en marche vers un totalitarisme tranquille
Trois nouveautés législatives et réglementaires sont tombées ces derniers jours et sont inquiétantes quant aux libertés publiques.
La première est l’adoption de la loi sur les fausses nouvelles. Derrière le prétexte de lutter contre les « fake news » en période électorale, qui pourraient fausser le scrutin, se cache la volonté d’établir un contrôle de l’information plus étroit. Jean-Luc Mélenchon ne s’y est pas trompé en dénonçant, à l’Assemblée, « une loi de circonstance faite pour interdire Russia Today et Sputnik [deux sites d’information russes sur le Net, RT ayant également lancé une web télé] ». Des avocats ont fait remarquer que cette loi aurait permis à François Fillon de demander l’arrêt de l’enquête du Canard enchaîné à son propos pendant la campagne présidentielle. Il y a peu de chance que cela se fasse un jour. Les médias dominants, peu avares de fausses nouvelles (voir l’actuelle affaire des terroristes « d’ultra-droite »), même si leur fonds de commerce est plutôt l’occultation des faits dérangeants, savent à qui il faut s’attaquer ou pas. Ce sont les médias alternatifs, qui ont profité de l’expansion d’Internet pour diffuser une information différente, qui sont visés. Les grandes entreprises du Net devancent, d’ailleurs, cette loi : YouTube a censuré TV Libertés et ce n’est que la dernière victime du mouvement de censure qui est engagé.
La deuxième nouveauté législative, passée inaperçue en dehors du milieu des amateurs d’armes, est le décret qui restreint un peu plus la possibilité d’acquérir et de détenir des armes, ainsi qu’un durcissement des modalités d’ouverture et de fonctionnement des armureries. Le prétexte, ici, est la lutte contre la délinquance et le terrorisme. Or, les seuls touchés sont les tireurs, les chasseurs et les collectionneurs. Autrement dit, les personnes qui se conforment déjà à la loi et n’utilisent leurs armes que dans le cadre (déjà très réglementé) de leurs loisirs. Le dernier tireur à avoir utilisé ses armes pour commettre des meurtres est Richard Durn, en mars 2002. Huit morts sont à l’actif de cet ancien militant socialiste et écologiste. Depuis, il y a eu des centaines de morts par armes à feu, que ce soit dans des règlements de comptes entre malfrats ou lors d’attentats. À chaque fois, ce sont des armes de guerre acquises et détenues illégalement qui ont été utilisées. La restriction concernant les armes pour le tir sportif ou la chasse ne gênera pas les criminels ou les terroristes qui passent par des circuits parallèles. L’objectif est, en fait, de désarmer les citoyens honnêtes pour qu’ils ne puissent pas se défendre en cas de besoin. Ce qui n’est pas bon signe quant aux intentions de l’État.
La troisième nouveauté est la limitation, à 80 km/h, de la vitesse sur les routes. Ce n’est pas tant cette limitation en soi qui est inquiétante mais le comportement des automobilistes que l’on observe depuis le 1er juillet. Beaucoup roulent en dessous de cette limite parce qu’ils ont peur. Non pas de l’accident : la grande majorité des Français conduit prudemment. De 1985 à 2005, le nombre de morts a été divisé par deux quand le trafic augmentait de 80 % (Direction de la sécurité et de la circulation routières, septembre 2006) ; plus de 60 % bénéficient d’un bonus de 50 % sur leur prime d’assurance ; et les voitures sont de plus en plus sûres (ceinture, ABS, etc.). Ce dont ils ont peur, c’est de se faire flasher pour un excès de vitesse de quelques kilomètres/heure. Peur de payer 68 € quand on peine à boucler le mois. Peur de perdre des points quand la perte de son permis signifie la perte de son emploi. La peur des autorités, ce n’est pas la marque d’un pays libre.
Contrôler l’information et censurer les opinions qui déplaisent au gouvernement, désarmer le peuple, faire régner la peur : autant de caractéristiques d’un État totalitaire.
La France n’est certes pas encore un pays totalitaire. Mais elle en prend le chemin. Il dépend de nous, par nos votes à venir, qu’elle reste un pays libre. Il ne faudrait pas qu’en cédant aux injonctions de faire barrage à un fascisme fantasmé, on tombe dans un totalitarisme émollient mais pas moins réel.