Assises de l’Hérault : une prostituée battue et dépouillée témoigne d’un viol HÉLÈNE AMIRAUX
La pierre avec laquelle elle s’est défendue en 2013 a conduit à l’accusé, un Roumain qui nie le viol.
Des mouchoirs, une pierre et un bustier maculés de sang. Un string déchiré. Et la description d’une voiture sur un ticket à gratter. Autant d’indices que Gladys, une Ghanéenne de 54 ans, a remis aux gendarmes le 2 novembre 2013, espérant obtenir justice pour son viol. C’était trois jours plus tôt, au bord de la D 185 conduisant au massif de la Gardiole, à Fabrègues. Deux hommes, l’un “assez grand et fort”, et l’autre “plus petit”, qui en voulaient, selon elle, à son argent, l’ont frappée puis délestée de 90 €, avant que l’un d’eux la force à un rapport sexuel, selon ses déclarations, dans un mazet abandonné.
Là où cette prostituée, exerçant depuis dix ans, avait l’habitude de recevoir ses clients. Agrippée à la gorge, elle avait tenté de les repousser avec une bombe lacrymogène. Mordant l’un à la main, frappant l’autre avec une pierre, au front. En vain. Malgré cet assaut, elle aurait réussi à se mettre sur le dos de manière à essuyer le front de son violeur blessé avec les mouchoirs. Et à récupérer des gouttes de sang sur son bustier. Comme preuve.
À huis clos
En 2014, l’ADN finit par livrer un suspect, impliqué dans une affaire de séquestration et de proxénétisme. Il s’agit de Sorin Morosanu, un Roumain vivant en couple avec une prostituée, elle-même propriétaire du véhicule des suspects, décrit par la victime. Mais depuis le début de l’instruction, il nie le viol.
Lundi encore, lors de la première journée de son procès devant les assises de l’Hérault, celui qui est surnommé Lacrima à cause d’un tatouage en forme de larme au coin de l’œil. Aux enquêteurs, il livre une version à l’opposé de la partie civile : un rapport tarifé avec une prostituée qu’il connaissait mais qui lui aurait volé les 700 € qu’il avait sur lui. Pour toute réponse, il aurait reçu la brique en pleine tête, avant d’être extirpé d’“une marre de sang” par un ami.
À l’issue de deux heures de déposition, à huis clos, d’une victime dont la présence à l’audience a été incertaine jusqu’à dimanche soir, le président Pinarel a relevé des failles. Comme ces prélèvements intimes réalisés par le légiste qui n’ont pas été analysés en laboratoire, parce que la patiente s’était lavée après les faits. Autant de chance en moins pour démontrer le rapport sexuel forcé et identifier son auteur. “Elle a la présence d’esprit de garder des mouchoirs mais pas d’aller faire des prélèvements après un rapport sexuel non consenti”, relève Me Mendel. Il y a aussi les doutes sur la scène de crime qui aurait pu être modifiée ou encore l’identification formelle par la victime de deux suspects qui pourtant ne correspondent pas aux deux profils ADN retrouvés.
Pour la partie civile, Me Gaillard s’est assurée auprès de l’officier en charge de l’enquête à l’époque, que sa cliente n’avait pas de souteneur. Selon lui, le mobile n’a rien à voir avec une lutte de places, au profit d’un “réseau de Roumaines”. La défense compte plaider l’acquittement.