Report de PPCR : quels effets concrets dès 2018 ?
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Les décrets reportant d’un an l’application de l’accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) ne sont pas encore publiés. Mais déjà l’application de cette annonce pose de nombreuses questions. Quels seraient les effets directs sur la fiche de paie et la retraite des agents ? Et comment ce revirement réglementaire impacterait les services RH ? Éléments de réponse.
« Absolument rien ne devrait changer sur la fiche de paie des agents en 2018 », assure Zineb Lebik, directrice du département expertise statutaire au Centre interdépartemental de gestion (CIG) de la grande couronne de la région d’Île-de-France. Tout au moins s’agissant des évolutions de salaire déjà entérinées. Même si le gouvernement maintient son projet de décaler d’un an l’application de l’accord (PPCR) (les quatre projets de décrets doivent être soumis au prochain Conseil commun de la fonction publique, mais celui risque d’être boycotté par les syndicats), « les augmentations et avancées de carrière ayant eu lieu jusqu’alors sont acquises, il n’est pas question de revenir dessus. »
Pas de revalorisations indiciaires ni d’avancements de grade
Avec ce report du protocole PPCR, l’intention du gouvernement est de décaler toutes les revalorisations indiciaires dues aux transferts primes/points (1), mais aussi le passage en catégorie A des assistants socio-éducatifs et des éducateurs de jeunes enfants de catégorie B.
Sur ce dernier point, « plusieurs collectivités territoriales avaient repoussé les promotions internes en se disant que PPCR interviendrait de toute façon pour eux dès début 2018 », note Zineb Lebik.
Les règles d’avancements de grade prévues par PPCR, pourraient aussi être gelées si le gouvernement va bien au bout de ses intentions. « En 2018, ce serait donc les mêmes qu’en 2017 », explique Zineb Lebik. Ainsi, ne devraient pas s’appliquer l’an prochain :
- L’avancement de la catégorie C, sauf, indique Zineb Lebik, les avancements aux grades d’agent de maîtrise principal et de brigadier-chef principal ;
- Les avancements, dans la catégorie A, aux grades d’attaché principal, d’ingénieur principal, de conseiller principal des activités physiques et sportives, de directeur de police municipale, de psychologue hors classe, de puéricultrice hors classe, d’infirmier en soins généraux hors classe, de conseiller supérieur socio-éducatif et de sage-femme hors classe.
Manque à gagner sur la fiche de paie
« Il n’y aurait pas de perte d’argent en tant que tel », résume Zineb Lebik. « Certes, mais il y aurait une baisse de rémunération par rapport à ce qui était prévu par l’accord signé sous le précédent gouvernement », souligne Didier Bourgoin (FSU territoriale).
Pour avoir une idée claire du manque à gagner en 2018, Olivier Ducrocq, DGS du centre de gestion du Rhône a sorti sa calculette. « Grâce à PPCR l’an prochain, les assistants sociaux éducatifs auraient par exemple gagné 16 points d’indice de rémunération (2). Soit environ 74 euros bruts mensuels auxquels on soustrait les charges… Si PPCR était décalé d’un an, les agents perdraient 60 euros nets par mois par rapport à ce qui était prévu, et environ 37 euros par mois sur leurs pensions de retraite. Des montants non négligeables… ».
En outre, Didier Bourgoin, comme d’autres représentants syndicaux – y compris ceux qui étaient opposés au texte – craint que ce report pourrait entacher la confiance des agents dans l’action syndicale. Et produire de fâcheuses conséquences sur les élections professionnelles du 6 décembre 2018.
Le report confirmé de PPCR pourrait en outre dégrader le dialogue social dans les collectivités. Dans celles n’ayant pas encore élaboré ou adopté leur nouveau régime indemnitaire, ce dernier pourrait devenir le seul outil de pression, pour les syndicats, pour compenser la « non augmentation » des salaires due au report de PPCR. Les discussions pourraient ainsi devenir plus musclées, encore, qu’attendues.
Impacts sur les services RH
Si les employeurs territoriaux considèrent le report de PPCR comme « un petit ballon d’oxygène », les services RH craignent, eux, les répercussions en chaîne.
Ce qui préoccupe Nicolas Salvagno, DRH de la ville de Nîmes (Gard), c’est la réaction des agents « lorsqu’ils réaliseront ce qui manque sur leur fiche de paie ». « Cela remet en question la parole que nous avons donnée à nos agents », déplore le DRH, qui se dit « très gêné par rapport à eux ».
Et cela pourrait générer des changements de stratégie d’évolution de carrière pour certains agents, comme de repousser des départs en retraite. Un adjoint administratif classé au 9e échelon (catégorie C) explique : « J’aurais dû passer au grade d’adjoint administratif principal 2e classe au 1er janvier 2018. Or, je comptais partir à la retraite le 1er juin 2019. Si PPCR est reporté, il me faudra sans doute retarder mon départ car à ce moment-là, je n’aurai pas l’ancienneté minimum requise sur le nouveau grade pour bénéficier d’une meilleure retraite. »
Cependant, techniquement, la grande majorité des collectivités disposant de logiciels de paie, le gel des revalorisations indiciaires et des avancements ne devrait pas poser de problème majeur. Il suffira d’attendre, l’an prochain, les mises à jour automatiques après parution des décrets d’application du protocole.
« Pour le service paie-carrières, cette pause pourrait être mise à profit pour mieux s’approprier les changements passés et à venir », se projette Bruno Jarry, DRH de la métropole et de la ville du Mans (Sarthe).