Le RAID et le GIGN ont effectué, le lundi 27 novembre, un exercice d’intervention en commun à Versailles. On ne peut que se réjouir de cette coordination, voire de cette complémentarité.
Le député Jean-Michel Fauvergue, ancien chef du RAID et rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité, a proposé le 12 octobre 2017 devant ladite commission que soit créé un commandement unique des deux forces nationales que sont le RAID et le GIGN. Lors de son audition par la commission de la défense nationale et des forces armées le 26 octobre 2017, le ministre de l’Intérieur a indiqué que cela lui semblait également une bonne solution. Quel étrange remède proposé quand on se rappelle l’origine du « mal ».
En effet, les attentats parisiens de 2015 ont fait rejaillir la concurrence entre les unités d’intervention spécialisées de la police que sont la BRI-PP de la préfecture de police de Paris et le RAID, rattaché à la direction générale de la police nationale, chacune se sentant légitime à intervenir sur Paris et la petite couronne. Le GIGN, pour sa part, a simplement été mis « en réserve » le 13 novembre 2015… Il paraît donc étrange que, pour régler une question de compétence « territoriale » entre la BRI-PP et le RAID, la solution proposée soit celle d’un commandement unique RAID/GIGN ! Alors qu’il existe un schéma national d’intervention qui a été adopté en avril 2016, qui n’a pas fait défaut, n’a pas eu à être mis en œuvre lors d’un attentat majeur et n’a donc pas fait l’objet d’une évaluation. Jean-Michel Fauvergue écrit pudiquement dans son rapport que « certaines des personnes auditionnées ont ainsi évoqué la transformation de la BRI de Paris en antenne du RAID ». Que de précautions oratoires pour évoquer la BRI-PP !
Par ailleurs, les arguments évoqués afin de justifier la création d’un tel commandement unique ne sont pas non plus pertinents et souffrent à l’analyse. Par exemple, « ce commandement commun pourrait être composé paritairement d’officiers supérieurs de la gendarmerie et de hauts cadres de la police, compétents en la matière, positionnés au-dessus des deux chefs d’unité et à disposition directe du ministre »… C’est une fausse bonne idée de penser qu’une composition paritaire gendarmerie/police, terme éminemment policier, puisse faire lieu d’organe de décision. Car, enfin, qui a une plus grande compétence que les chefs du GIGN et du RAID au point de se situer au-dessus d’eux et de se substituer à eux pour décider ? La réponse : personne. Et puis, qui va commander l’ensemble, car il faudra bien un chef ? Cela promet une sacrée empoignade. Une promesse de commandement alterné police/gendarmerie serait, par ailleurs, un leurre, comme l’a montré l’exemple du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) dans le quinquennat précédent.
Non, la solution préconisée par le député Fauvergue de rajouter une couche au mille-feuille décisionnel n’est pas la bonne. La vraie solution réside dans la volonté du ministre de l’Intérieur de traiter l’origine du mal, qui est la concurrence territoriale BRI/RAID, et de faire aboutir les évaluations opérationnelles sur les compétences spécifiques des différentes unités, mission confiée à l’Unité de coordination des forces d’intervention (UCoFI), unité mixte police-gendarmerie. C’est au ministre d’imposer, d’exiger que ce travail soit fait afin d’apporter encore davantage de sécurité aux Français.
J’émets aussi une réserve de principe sur cette proposition qui entraînerait la fin de la tutelle de la gendarmerie sur le GIGN et son rattachement direct à l’autorité politique par le biais de ce commandement unique « à disposition directe du ministre », écrit le rapporteur. On se rappelle le rattachement direct du GIGN à l’Élysée sous l’ère Mitterrand. Et on connaît la suite…