Antiterrorisme : la surenchère sécuritaire
Après l’attentat-suicide de Manchester, Emmanuel Macron souhaite prolonger l’état d’urgence jusqu’en novembre et faire voter une nouvelle loi antiterroriste. La décision finale reviendra aux députés élus les 11 et 18 juin.
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Emmanuel Macron était ce matin au Conseil de défense convoqué après l’attentat-suicide de Manchester, perpétré par un homme de 22 ans à la fin d’un concert d’Ariana Grande. Revendiqué par Daesh, l’attentat a fait vingt deux morts et des dizaines de blessés, parmi lesquels de très jeunes victimes. La réponse du nouveau gouvernement a immédiatement pris la forme de la surenchère sécuritaire.
Le président de la République a d’abord annoncé la prolongation de l’état d’urgence, jusqu’au 1er novembre 2017. L’état d’urgence était actuellement en cours jusqu’au 15 juillet : si les nouveaux députés élus en juin acceptaient de se ranger à la volonté présidentielle, il s’agirait de sa sixième prolongation. Le mois de novembre 2017 signerait alors deux ans passés sous le régime de cet état d’ « exception ».
Le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb déclarait ce matin vouloir « prolonger l’état d’urgence et en même temps voir les conditions pour en sortir ». Une formule qui dissimule à peine la volonté de pérenniser les modalités de l’état d’urgence pour des « cas particuliers ». Comprendre : les « spectacles, organisations, manifestations ». Gérard Collomb veut « faire que dans ces cas-là, on puisse continuer à avoir recours à des mesures administratives et pas des mesures normales ».
Emmanuel Macron promet également une nouvelle loi antiterroriste dans les semaines à venir. Lors du Conseil de défense, il a réclamé en ce sens des mesures de renforcement de la sécurité, hors état d’urgence.
« Task force anti-Daech »
Le président de la République a également réitéré sa volonté de mettre en place au plus vite une « task force anti-Daech ». Une promesse de campagne, aux contours encore (très) flous. D’après Gérard Collomb, « ce n’est pas une force spéciale, mais une coordination qui permet d’agir mieux sur le terrain » ; 50 à 100 agents seraient mobilisés, 24 heures sur 24. Cette coordination des différents services de renseignement ne devrait pas se concentrer seulement à l’Élysée, mais à tous les échelons. Reste à définir les places de chacun, dans le cas où ce centre de coordination apporte une véritable nouveauté à ce qui existe déjà.
Parmi les autres promesses du quinquennat, on peut rappeler la création de 10 000 postes de policiers et gendarmes. Gérard Collomb, qui a armé la police municipale de sa ville de Lyon après les attentats de novembre 2015, veut engager une discussion avec les maires de France – il s’est entretenu hier avec le maire de Nice, Christian Estrosi. Il assure être « favorable à ce que les polices municipales soient armées, à condition d’être formées », et souhaite leur rapprochement avec les forces de l’ordre nationales.
Le ministre de l’Intérieur a également promis une nouvelle législation « dans les trois à quatre mois qui viennent » sur le trafic de stupéfiants, qui alimente, selon lui, les réseaux du terrorisme. Les personnes interpellées pourraient faire l’objet d’une « contravention immédiate », assortie d’une mesure d’éloignement pour « leur interdire de réapparaître dans le quartier ».