Avec Irma, les plus démunis craignent d’avoir tout perdu dans les Keys
« C’est nous qui vous servons votre café (…) Nous sommes le peuple, nous ne sommes pas riches »: après le passage d’Irma, Patty Purdo, une serveuse de restaurant, craint que les plus démunis se retrouvent exclus du processus de reconstruction de la Floride.
La femme de 55 ans est en larmes quand elle fait visiter son mobile home dans l’archipel des Keys, au sud de l’Etat. Comme les habitants des 105 autres mobile homes de ce lotissement du village d’Islamorada, son foyer est maintenant dévasté.
« Ca c’était mon porche », rigole-t-elle nerveusement devant un amas de débris. Sur la plage voisine, au milieu du sable et des branches, des débris de tout genre se sont entassés: radios, matelas, vêtements et même un jet-ski.
75% de ces maisons préfabriquées, beaucoup plus légères et fragiles que des habitations conventionnelles, ont été totalement rasées par les vents violents d’Irma, qui ont soufflé à 215 km/h.
Les habitants ont maintenant peur que les propriétaires du lotissement ne reconstruisent pas leur communauté, et préfèrent vendre ce terrain situé sur une île paradisiaque pour faire construire un hôtel de luxe ou des appartements.
« On ne veut pas partir, on veut rester. C’est comme ça, on n’a pas grand chose d’autre », explique-t-elle en pleurs. Chez elle, toutes ses affaires sont trempées, recouvertes d’algues ou hors d’usage. Seul son lit peut encore être utilisé.
« On a peur qu’ils rasent tout avec un bulldozer et construisent des beaux appartements et des maisons de riches. On n’a nulle part d’autre où aller », continue-telle.
‘Ca pourrait prendre des mois’
Un peu plus au Sud, Shawn Sims s’estime chanceux: sa maison est toujours debout. « On a deux nouvelles maisons qui ont été construites devant chez nous, elles ont résisté. Elles étaient construites aux normes », raconte ce vendeur de téléphones portables de 50 ans.
A côté de lui, un petit bâtiment qui faisait probablement deux étages avant le passage d’Irma n’a pas eu cette chance: il s’est écroulé.
Dans le rang des soulagés, Orlando Morejon, un chirurgien de 51 ans, se félicite que le voilier de 12 mètres qu’il a retrouvé dans son jardin n’ait pas touché sa maison.
« Il va y avoir beaucoup de réparations coûteuses, mais la maison est toujours là et, encore plus important, nous sommes encore là », relativise-t-il. Le bateau a visiblement été emporté par la marée de tempête avant de finir devant chez lui. Il doit maintenant retrouver son propriétaire.
Au bout d’Islamorada, d’où il est impossible d’aller plus en avant, Marilyn Ramos ne peut pour sa part que constater les ravages causés par Irma dans son restaurant.
« Nous n’avons pas encore pu évaluer tous les dégâts. Toutes les zones ont été touchées, mais certaines sont plus impactées que d’autres. C’est dévastateur, mais nous sommes une communauté forte, nous allons vite relancer tout ça », explique la propriétaire du Habanos Restaurant.
« Ca va prendre un peu de temps pour revenir à la normale. Je veux être optimiste et parler en semaines, mais ça pourrait être des mois. C’est notre gagne-pain donc bon… », ajoute-t-elle.
Pour l’instant cela ne semble pas envisageable: le toit s’est écroulé, et une odeur peu ragoûtante, mélange d’algues et de nourriture pourrie, se dégage de la cuisine.