Casse de Bessières : qui sont les Spaggiari toulousains ?
ne équipe ancrée dans la grande délinquance à laquelle se greffent des techniciens du bâtiment, soudeur ou expert en chalumeau. C’est cet attelage atypique qui constitue l’essentiel du commando des égoutiers de Bessières. Une équipe resserrée autour de quatre hommes, dont Pascal Teso, un Tarnais domicilié à Bessières, cette commune qui l’a vu grandir et galoper dans les égouts lorsqu’il était enfant.
Dans son imaginaire, une icône : Albert Spaggiari, figure du grand banditisme et auteur du célèbre casse de Nice en 1976. Dans son entourage on le répète : «Spaggiari c’est extra ce qu’il a fait, c’est pas comme Mesrine, lui c’est un bandit !» Des paroles longtemps gravées et qui finissent par nourrir chez lui le goût du risque et de l’interdit mais aussi l’appât du gain. Installé dans le bâtiment, Pascal Teso sollicite alors un prêt au Crédit Agricole de Bessières. Pour lancer sa carrière, il se dit qu’un coup de pouce chez ceux qui ont le pouvoir de dire «oui», peut l’aider à démarrer. Mais il essuie un cinglant refus de la banque. Une vraie claque. Au même moment, un membre de sa famille lui offre un bouquin sur la vie de Spaggiari. Un cadeau qui va changer son destin.
Dans un snack de Bessières, il retrouve Cédric L., jeune serveur, copain admiratif de Teso. Les deux hommes sont très proches. Cédric L., auquel on reproche d’avoir fait le guet à l’extérieur du tunnel et d’avoir aidé à évacuer quelques gravats et aussi celui qui aurait mis en relation le reste de la bande avec Pascal Teso. Dans une salle de sport, il fréquente Wlodizimiers Janczyszyn, dit «Vlad» le Polonais, autoentrepreneur, spécialisé dans les casses et les cambriolages. Lequel s’est lié avec un ancien taulard d’origine croate, Zoran Panic, ex-légionnaire, dit «La Zoze», connu des services d’enquête pour acheter voitures et téléphones avec de faux papiers. De fil en aiguille, l’équipe reçoit le renfort du Toulousain Dominique Soulage, importateur de chalumeau dans le muretain et connu des services d’enquête pour des vols aggravés. Soulage et «Vlad» le Polonais travaillent en Suisse, à Crans Montana dans un centre de karting sur glace.
D’un côté le savoir-faire technique, de l’autre des experts en casses et vols en tout genre dont les ambitions grandissent un peu plus chaque mois. Une montée en puissance illustrée par le parcours de «Vlad», qui de 2007 à 2011 multiplie les vols de berlines à Toulouse et en Tarn-et-Garonne. En 2007, il se laisse enfermer dans un restaurant Flunch de Toulouse, caché au fond des ballons de jeux pour enfants. «J‘avais remarqué la présence du coffre-fort en allant manger», avait-il déclaré, en avril 2017, devant le tribunal correctionnel lors de son procès. Bien avant le casse de Bessières, «Vlad» avait reconnu un autre projet très audacieux après la lecture d’un livre sur le braqueur Antonio Ferrara. Il avait noté les tournées de convoyeurs de fonds, à Muret, Ramonville et Toulouse, avant d’abandonner son projet jugé trop compliqué. À ses heures perdues, il vend des voitures de luxe à bas prix et consulte des sites paramilitaires. Avant l’attaque de Bessières, «Vlad» a des fourmis dans les jambes et de l’adrénaline à revendre. En prison, il croise la route de Panic «tombé» dans des affaires de vols et d’escroquerie. Un homme extrêmement méfiant, ultra-mobile qui utilise des brouilleurs de téléphone, toujours accompagné de quelques lieutenants assurant sa protection. À leur sortie de prison, la connexion se fait avec le clan Teso. Lorsque le commando est arrêté par les gendarmes de la section de recherches, le 5 avril 2016, au terme de moyens exceptionnels (lire plus bas), «Vlad» nie sa participation au creusement du tunnel. «Il était persuadé que le casse de Bessières n’allait pas marcher. D’ailleurs, il conteste les charges et les éléments de preuve retenus contre lui. Il estime qu’il y a eu beaucoup de trop de raccourcis», précise son avocat, Me Apollinaire Legros-Gimbert qui assure sa défense, avec Me Edouard Martial. L’opération de Bessières réussie, «Vlad», Panic, Soulage et quelques autres lorgnent aussitôt sur une autre banque, à Reims, où le projet d’un autre tunnel et des actes préparatoires étaient en cours. Tout comme l’attaque du dépôt de la Brinks, à Toulouse ou le vol de l’armurerie du PSIG dans une caserne de gendarmerie toulousaine. Des projets auxquels ils devront également répondre devant le tribunal correctionnel.