Ces maires qui ont levé le pied sur les PV avant les municipales
Le Syndicat national des policiers municipaux proteste contre des consignes de relâchement données aux agents avant le vote.
Certains automobilistes ont-ils senti un certain relâchement dans les contrôles? À la veille de ces élections locales, plusieurs dizaines de villes auraient donné consigne à leur police municipale de lever le pied sur les PV routiers. C’est ce que dénonce Frédéric Foncel, président du Syndicat national des policiers municipaux qui a depuis le début de l’année eu connaissance d’une quarantaine de cas sur les 3600 polices municipales que compte la France. Des fonctionnaires de ces services sont venus se plaindre auprès de lui de ces pratiques.
«Ces consignes, apparues en début d’année, ne sont jamais écrites, toujours orales. Elles sont le plus souvent indirectes, avec des phrases comme: “n’oubliez pas, on est en période électorale, on met un peu la pédale douce”, ou encore “sanctionnez avec discernement, on va voter”. Parfois, elles sont plus appuyées», indique le responsable syndical.
Sans dénoncer un parti plus qu’un autre, Frédéric Foncel note que ces pratiques sont l’œuvre des maires sortants, ces derniers semblant craindre les éventuels effets d’un PV mal digéré sur le vote des automobilistes électeurs… «Alors, on demande aux agents de fermer les yeux, principalement sur le stationnement mais aussi sur d’autres écarts», souligne Frédéric Foncel qui rappelle que la police municipale est habilitée à verbaliser quasiment toutes les infractions routières.
Les services du Défenseur des droits ont également été informés de ces manières d’orienter le travail des agents, en matière de stationnement. Le délégué général à la médiation avec les services publics, Bernard Dreyfus, a recueilli depuis l’été huit témoignages de ce type. Deux d’entre eux – émanant de la banlieue parisienne et de la région Paca (Provence-Alpes-Côte d’Azur) – font état de ce genre de directives intervenues en février. «J’ai d’ailleurs contacté le directeur général d’une de ces mairies pour lui signaler ces pratiques. Il m’a dit qu’il allait voir», raconte Bernard Dreyfus. Les autres témoignages font référence à des consignes plus lointaines, intervenues durant l’été. À l’occasion d’un festival, il a été demandé de ne verbaliser que les voitures dont les plaques d’immatriculation n’étaient pas du département…
Bernard Dreyfus qui a voulu vérifier ces accusations s’est d’ailleurs rendu dans une commune de l’ouest de la France où ces pratiques lui avaient été signalées. «J’ai suivi un policier municipal et j’ai constaté qu’il épargnait certains automobilistes», note-t-il. Selon un fonctionnaire de la police nationale, «ces ordres déguisés n’ont rien d’étonnant. Un policier municipal que je connais a d’ailleurs rejoint la police nationale car il en avait assez de ces mots d’ordre dans le domaine de verbalisation, ou dans d’autres domaines d’ailleurs, et qui entravaient son travail.»
«Toute infraction constatée doit être verbalisée. Or même si ces injonctions sont illégales, le policier municipal ne peut rien faire car il redoute de s’exposer à de possibles sanctions», selon Frédéric Foncel qui demande l’intervention du ministre de l’Intérieur pour faire cesser ces dérives. «Il faut que les polices municipales soient inspectées, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.» Pour Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre les violences routières, ces pratiques sont «graves». «Si elles sont révélées, la responsabilité de l’élu peut être engagée en cas d’accident.»