Je réunis @Place_Beauvau l’ensemble des directrices et directeurs du Ministère de l’Intérieur pour faire le point sur l’avancement de grandes réformes en cours et notamment le déploiement de la #PoliceSécuritéQuotidien.
Mobilisation totale au service des Français.
Collomb claque la porte du nouveau monde
VIDÉO. Après avoir été un éclaireur de la macronie, le ministre de l’Intérieur a piétiné l’autorité présidentielle en forçant son départ du gouvernement.
Par Joseph Miguel
Il avait été le premier. Avant les socialistes, avant les quadras ambitieux de Bercy, avant François Bayrou ou Nicolas Hulot, Gérard Collomb avait été le premier politicien d’envergure à rejoindre Emmanuel Macron, ce jeune candidat relativement inconnu qui prétendait gagner la présidentielle. Une prise de guerre décisive pour la victoire finale parce qu’elle lui avait donné du crédit et qu’elle avait créé un appel d’air, déclenchant une série d’autres ralliements politiques. Aujourd’hui, il quitte le navire de la macronie qui vogue sur des flots tumultueux, en grande partie à cause de lui.
D’abord, parce que son impopularité au sein de la police pourrait bien être à l’origine de l’affaire Benalla, grain de sable qui a enrayé la mécanique présidentielle. « Je pense que ce sont les flics qui ont sorti la vidéo pour nuire à Collomb. Et le gouvernement sait très bien qu’ils auraient pu recommencer », avance un bon connaisseur de Beauvau. Ensuite, parce que cette affaire a signé le début de la rupture avec Emmanuel Macron. Lors de son audition par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, il s’était déchargé sur l’Élysée (et la police…). Depuis, il a déclaré qu’il s’en irait après les européennes pour partir à la conquête de la capitale des Gaules, dégradant l’autorité présidentielle, fissurant un peu plus la majorité, décrédibilisant le processus de désignation des candidats d’En marche ! pour les municipales. Bref, de la vieille politique qui s’invite dans le nouveau monde.
Un statut à part en macronie
Grâce à son rôle décisif dans l’élection du président et à la proximité de son couple avec le couple présidentiel, Collomb jouissait d’un statut à part en macronie. Il pouvait tout se permettre et s’était tout permis : mépriser ouvertement Édouard Philippe, rappelant à maintes reprises, en privé, qu’il avait participé à son casting, et surtout critiquer ouvertement le président. Il avait appuyé là où ça fait mal : sur « l’hubris », l’arrogance, l’isolement de Jupiter. Jusqu’à devenir plus frondeur que marcheur. D’aucuns le soupçonnent d’avoir agi ainsi pour prendre ses distances avec l’impopularité présidentielle, potentiel épouvantail électoral lors des municipales de 2020. Il avait déjà adopté cette stratégie avec un François Hollande qui touchait le fond, retirant le logo du PS de ses affiches de campagne et droitisant son discours pour éviter d’être associé au socialisme. Elle avait fait ses preuves.
« Gentleman agreement »
À la suite de ses déclarations virulentes, il avait été convoqué à l’Élysée pour un dîner d’explication. Les deux hommes avaient conclu un « gentleman agreement », ont-ils expliqué en petit comité : il pourrait partir à la conquête de Lyon après les européennes à condition qu’il se tienne à carreau jusque-là. Mais il a préféré tout casser en précipitant son départ et en présentant sa démission au chef de l’État. Macron, qui tient à rester « maître des horloges », l’a refusée dans un premier temps. Encore une fois, Collomb a piétiné l’autorité présidentielle en maintenant sa démission et en parlant de son rôle de ministre au passé dans les médias. Son départ était inéluctable tant la situation semblait inextricable.
Depuis longtemps Collomb était devenu le ministre de l’Intérieur… de Lyon. Ses collaborateurs à Beauvau savaient que le ministère n’était qu’une parenthèse d’une carrière politique commencée il y a cinquante ans. À Beauvau, il a toujours gardé la même obsession pour sa ville, dont il a été maire de 2001 à 2017. Et l’officialisation de son départ a empiré la situation : comment aurait-il pu tenir plus longtemps son ministère, gérer la police en temps de menace terroriste élevée ou réformer l’islam de France alors qu’il avait la tête ailleurs ?
Ministre à « mi-temps »
Quelle trace Collomb va-t-il laisser à l’Intérieur ? Celle d’un ministre à « mi-temps », comme le surnommaient les mauvaises langues à Beauvau, tant il multipliait les allers-retours dans sa ville de cœur ; d’un ministre qui a fait de la loi asile-immigration une priorité absolue, qui a parlé de « benchmarking » au sujet des migrants choisissant leur pays européen, fissurant un peu plus la majorité tout en s’assurant une certaine popularité auprès des Français particulièrement sensibles à cette thématique. « Comment parler de valeurs républicaines alors qu’on ne trouve plus que des produits maliens dans une épicerie de Sevran », lançait-il aux directeurs de son ministère, qu’il avait réunis pour les remobiliser après l’annonce de son départ programmé. Lors de cette réunion, le ministre est apparu « goguenard », « fier de lui », comme quelqu’un qui « avait l’air d’avoir fait un mauvais coup ».
Il laissera aussi l’image d’un ministre qui n’a jamais réussi à endosser le costume de premier flic de France, celle d’un ministre qui, selon plusieurs connaisseurs du dossier, a reculé des quatre fers pour entamer le processus de consultation de la réforme de l’islam de France, pourtant érigé en priorité du quinquennat par Macron, celle aussi d’un ministre qui a aussi tout fait pour associer son nom à celui de la police de sécurité de quartiers (PSQ) avant de partir. Mais surtout celle d’un ministre qui a ouvert la porte du nouveau monde avant de la claquer derrière lui.