J’aurais aimé entonner un chant de Noël sans arrière-pensée, un hymne aux lumières tendres et chatoyantes qui palpitent dans la nuit, à la chaleur du foyer plein comme un œuf, à la crèche, à la messe de minuit, aux cadeaux des adultes déposés au pied du sapin pour les enfants éblouis.
Il y a un peu de tout ça, dans nos souvenirs. Mais il y a aussi autre chose, comme une amertume, un vague désenchantement, que nous nous efforçons aujourd’hui de congédier, avec plus ou moins de succès.
Car Noël, dans notre civilisation chrétienne, c’est in fine la célébration de la famille. La Sainte Famille, modèle idéal de la famille chrétienne, qui a longtemps structuré la collectivité.
Les choses ont commencé à aller furieusement de travers quand la collectivité a cédé le pas à l’individualisme (entendez l’injonction de la réussite individuelle : la visée de jouissance, narcissique et consumériste), quand la génération parricide des soixante-huitards a accédé aux manettes institutionnelles. La réalité familiale, qui avait toujours été de difficulté, s’est alors transformée en peau de chagrin, en désastre social et démographique.
Certes, nos idéologues-fossoyeurs essaient bien de réenchanter le mariage et la famille sur les versants homosexuel et racialiste (« il faut relever le défi du métissage », nous enjoignait déjà le Président Sarkozy). Mais cet essai de réenchantement par l’extraordinaire, qui n’a que faire du modèle conservateur de la Nativité chrétienne, ne vaut que pour les médias.
Malgré tous les efforts consuméristes, les banquets et cadeaux déployés, Noël reste en souffrance pour ce qui est de célébrer la famille. A fortiori quand elle se réduit à un duo ou au solo…
Sous ces auspices post-chrétiens, Noël revêt toujours ses habits de lumière mais ils ne recouvrent que le vide de la désagrégation sociale, culturelle et familiale, sur lesquels les grandes surfaces font leur beurre.
Pourtant, il me semble que cette aliénation est absente ou bien moindre dans les milieux où persiste la foi chrétienne. Nous savons qu’il nous faut redonner vie à notre culture chrétienne, pourquoi ne pas le concrétiser par un retour à la messe de minuit ? Il faudra y songer l’an prochain, mais il y aura bien d’autres fêtes entre-temps… Et il n’est pas nécessaire d’être croyant pour éprouver l’émotion de notre appartenance à la communauté chrétienne. Par les temps qui courent, où la carence identitaire fait des ravages, c’est un sacré cadeau dont il serait dommage de se priver.