Un homme, plusieurs vies. Après 39 ans passés dans la maison bleue, Jean-Michel Fauvergue a bouclé sa carrière à la tête du prestigieux Raid. 2013-2017, période noire : Hyper-Casher, Bataclan, siège de l’appartement à Saint-Denis… Le super-policier a vécu le terrorisme islamiste de l’intérieur, l’a affronté yeux dans les yeux.
Invité par tous les médias à réagir à l’attentat de Strasbourg, ce qu’il a déjà fait pour L’Est Républicainen appelant à « ne pas baisser ni les bras, ni la garde » ( édition de jeudi ), l’ex-boss du Raid sera à Besançon, ce lundi, dans une ambiance plus festive… Et plus politique. Son nouveau monde. Devenu député LREM, il est l’invité d’honneur des Lauriers des Collectivités, ce lundi à Micropolis ( à partir de 18 h, entrée libre ).
Pourquoi être passé de l’autre côté du rideau, pour embrasser cette nouvelle carrière politique ?
Le hasard a voulu qu’on ait une connaissance commune avec Emmanuel Macron, alors candidat. On a beaucoup parlé en tête à tête de son programme sécurité, je pense avoir pu enrichir son équipe de mes idées et de mon expérience. La question s’est posée de continuer. Je ne voulais pas d’un poste de conseiller, je voulais être libre. La députation me convenait, je me suis présenté là où j’habitais.
Vous avez été aussitôt missionné pour rédiger un rapport sur les réformes à engager en termes de sécurité : quel était son objectif ?
Comment mieux faire travailler ensemble police et gendarmerie nationales, police municipale et sécurité privée ? Durant six mois, ma collègue Anne Thourot et moi avons entendu plus de 200 personnes, partout en France ainsi qu’à l’étranger, notamment en Espagne. On a fait 78 propositions. Je veux remettre la question de la sécurité des citoyens sur la table.
Vous actez notamment la nécessité, selon vous, d’armer les polices municipales. Un sujet sensible à Besançon…
Les policiers municipaux sont très favorables à cette mesure, donc on y a réfléchi. Et effectivement, on a retenu deux raisons principales. Un, le policier en uniforme est devenu une cible. Deux, les policiers peuvent être les primo-intervenants sur une situation chaude, comme une fusillade. Il faut qu’ils soient armés pour riposter et protéger les populations.
Vous avez participé à l’élaboration de la « police de sécurité du quotidien », nouvelle doctrine gouvernementale. A quels besoins veut-elle répondre ?
Avant d’être chef du Raid, j’ai été confronté aux incivilités, à la petite délinquance. C’est quelque chose d’important pour les citoyens. La police et la gendarmerie ne sont malheureusement plus en contact avec le terrain. Il faut retrouver cette dimension de proximité. On a l’abandonnée dès les années 70-80, alors que c’est une idée du siècle à venir ! Il faut reconstituer ces tissus partout, mais de manière différenciée : on ne fait pas la même police en Ardèche ou au milieu de la Courneuve.
À Besançon, Planoise fait partie des quinze premiers quartiers dits de « reconquête républicaine ». Quels sont les objectifs ?
Il y aura du renfort policier (ndlr : une quinzaine d’agents à Planoise, avec un retard de quatre mois par rapport à ce qui avait été annoncé). Il faut remettre des moyens humains et techniques. Reconquérir, ça veut dire ce que ça veut dire : reconquérir et y rester. Donc chasser ceux qui y instaurent un contre-modèle social, basé sur le commerce du stupéfiant, et qui installent la terreur chez les habitants.
Dans cette bataille au long cours, quel rôle ont les territoires ?
Très important. On a trop souvent imposé des schémas de travail depuis Paris, en essayant de faire rentrer des carrés dans des cercles. Ça ne fonctionne pas. Vous avez deux personnes importantes au niveau local : le maire, qui connaît bien sa commune, et le commissaire de police ou l’officier de gendarmerie, qui connaît sa délinquance sur sa circonscription.
Que répondez-vous à ceux qui opposent la sécurité aux libertés individuelles ?
Les gens qui ont cette position ne sont pas intégrés à la vie locale. Le citoyen veut deux choses : être en sécurité, parce que c’est un droit fondamental, mais aussi jouir de ses libertés. Les deux sont complémentaires.