La loi et l’ordre en Argentine: les amis du commissariat N°35
La corruption endémique de la police argentine vient de connaître cette semaine un nouvel épisode spectaculaire, même pour un public argentin qui en a déjà vu d’autres: le Directeur Général de la police de la capitale (l’équivalent du préfet de police à Paris) vient d’être mis en taule pour corruption.
Tout est parti d’une dénonciation anonyme d’un flic honnête (oui, il y en a quand même) corroborée par des témoignages de victimes des flics malhonnêtes (oui, il y en a encore) du quartier de Nuñez, au nord de la ville. Sous couvert de financer la très officielle « Association des amis du commissariat N°35 » la commissaire principale (présentement en prison) et son adjoint (qui a préféré prendre la fuite) assistés de quelques comparses se livraient à un racket systématique des commerçants et des « manteros » (vendeurs à la sauvette) de leur secteur. Une partie de l’argent ainsi amicalement collecté remontait jusqu’à la DGC -(Direction Générale des Commissariats) dont le patron, un certain Potocar, est sorti hier du bureau du procureur avec les menottes aux poignets.
Macri n’a décidément pas la main heureuse avec ses nominations de responsables policiers: l y a quelques années, l’alors maire de Buenos Aires avait soulevé un scandale en nommant au poste de chef de la Métropolitana le trop fameux commissaire Palacios (compromis dans la manipulation de la première enquête sur l’attentat de l’AMIA) qui avait dû démissionner quelques jours seulement après être entré en fonction.
Le gouvernement et les médias de droite (en particulier Radio Mitre qui avait complaisamment accueilli les grandiloquentes protestations d’innocence de Potocar) avaient commencé par défendre énergiquement Potocar mais la décision du procureur de l’envoyer directement en prison en arguant qu’il risquait de s’enfuir a réduit au silence les plus fervents amis de la loi et de l’ordre.
Cette vilaine affaire tombe mal pour un gouvernement de droite qui a fait de la sécurité et de la lutte contre la corruption ses chevaux de bataille, d’autant plus que Macri a imposé la fusion de « sa » police municipale récemment créée (la Metropolitana) avec la Police Fédérale (dite « La Force » ou « La Fédérale ») qui était auparavant seule responsable du maintien de l’ordre dans la capitale.
Or cette fusion se passe très mal et le ministre local de l’intérieur a été hier copieusement chahuté lors d’une réunion avec des policiers de base se plaignant de manquer d’équipement (gilets pare-balle etc) pour faire face à des délinquants de plus en plus lourdement armés: une petite ville du nord du pays a été il y a quelques jours prise d’assaut par un commando organisé militairement d’une quarantaine de braqueurs venus du Brésil.
Tout ceci se déroule dans une ambiance de surenchère sécuritaire exacerbée par plusieurs assassinats récents de jeunes femmes, dont un crime commis par un délinquant sexuel récidiviste dont la libération anticipée a été sévèrement critiquée. Un projet de loi rendant incompressibles les peines prononcées contre les coupables de certains crimes graves fait actuellement la navette entre la Chambre des Députés et le Sénat.
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