Emmanuel Macron a effectué, mercredi dernier, son premier voyage en Algérie en tant que président de la République française. Que faut-il retenir de cette visite ? C’est la question que Boulevard Voltaire a posée à l’historien Dimitri Casali.
Que faut-il retenir du voyage d’Emmanuel Macron en Algérie ?
Pour moi, il s’en est quand même bien tiré. Il s’agissait d’une visite un peu minée après la déclaration du président Bouteflika en juillet dernier, qui exigeait pour la énième fois des excuses de la France pour la colonisation de l’Algérie.
Il n’est pas tombé dans le piège de l’instrumentalisation. Il a plutôt bien déminé le terrain auprès des étudiants à qui il s’est adressé et lors de ses interventions dans cette librairie. Il a plutôt bien répondu à ce jeune Algérien qui l’apostrophait une fois encore sur ces excuses. Il a dit : « Mais quel âge avez-vous ? » L’autre lui répond 25 ans. Macron lui répond alors : « Il faut sortir de cette repentance une bonne fois pour toutes pour essayer d’aller de l’avant. »
Le problème majeur, aujourd’hui en France comme en Algérie, c’est l’économie. Les Chinois et les Indiens occupent des positions économiques considérables alors que la France a perdu des parts de marché incroyables. Il faut reconquérir toutes ces parts de marché, car il reste beaucoup d’accointances et un héritage commun important. Il faut aller de l’avant, cesser d’instrumentaliser notre Histoire pour regarder vers l’avenir. C’est une vérité première qu’il ne faut pas oublier dans un monde aussi mouvant.
Le blocage vient principalement du FLN.
La phrase que l’on retiendra est certainement : « Qu’est-ce que vous venez m’embrouiller avec la colonisation ? » Il semble y avoir une volonté de notre Président de tourner cette page de notre Histoire.
Bien sûr, il le faut. Cela fait quand même cinquante-cinq ans que ça dure. Les Algériens transforment cette histoire de la colonisation française en oubliant tous les aspects positifs. On peut citer les œuvres sanitaire, éducative, et les infrastructures économiques.
La première vérité qu’il faudrait apprendre aux petits Algériens est que l’Algérie n’existait pas avant l’arrivée des Français.
Ce sont les Français qui ont bâti l’État, formé l’Algérie, qu’ils ont développée et fait prospérer. Je rappelle que c’était le quatrième pays exportateur de vin pendant la colonie française. Je rappelle qu’il n’y avait pas de problèmes alimentaires à l’époque des Français.
Aujourd’hui, l’économie algérienne est dans un état pitoyable. Ils essaient toujours d’instrumentaliser cette haine de la France pour essayer de contrôler leur population dont 50 % a moins de 25 ans.
Comment expliquez-vous que la réconciliation franco-allemande n’ait pris que quinze ans alors que, cinquante ans après, nous n’arrivons pas à nous réconcilier avec l’Algérie ?
C’est un bon exemple. En 1963, Adenauer et de Gaulle ont réussi à franchir un pas. On voit bien que c’est d’abord une volonté politique. Il y a eu plusieurs mains tendues, je pense aux présidences de Chirac, notamment. On voit bien que le blocage vient uniquement des élites algériennes, et en particulier du FLN qui tient les leviers du pouvoir. Il essaie de se maintenir au pouvoir, en entretenant cette haine de la France, en distillant de fausses informations. Les manuels scolaires algériens ne parlent pas de la colonisation d’une manière objective. Tous les aspects positifs dont je vous ai parlé sont toujours passés sous silence.
Il faut cesser d’avoir une vision manichéenne de l’histoire de la colonisation algérienne avec des mauvais d’un côté – nous, les Français, les oppresseurs – et les bons de l’autre – les Algériens. Toute l’histoire de la colonisation est anti-manichéenne par essence.
Il y eut de grandes œuvres. Il faut commencer par Alphonse Laveran, prix Nobel 1907, qui a éradiqué les maladies infectieuses. Cela a permis à la population algérienne de passer de 2 à 10 millions à notre départ.
On voit bien qu’il n’y a jamais eu de génocide. Quand le Président Macron a parlé de crime contre l’humanité lors des élections présidentielles, il a fait une erreur colossale. On lui a mal appris l’histoire de la colonisation française à lui aussi. Depuis trente ans, une véritable désinformation règne aussi dans les manuels français, avec des historiens comme Benjamin Stora, qui en arrive à falsifier la véritable Histoire dans un but idéologique.
Heureusement qu’une majorité d’Algériens prônent cette réconciliation avec la France. Certains intellectuels, comme Boualem Sansal, en ont marre de cette instrumentalisation de l’Histoire par leur gouvernement. Ils veulent aller de l’avant, faire cesser la mainmise sur l’économie algérienne par les Chinois et les Indiens.