Le stationnement évolue, les agents de surveillance aussi
Publié le 21/11/2017
La décentralisation du stationnement payant entre en vigueur le 1er janvier. Que les villes externalisent ou non ces nouvelles fonctions, la réforme touche les missions et l’organisation du travail des ASVP, les agents de surveillance de la voie publique.
Au 1er janvier 2018, le stationnement payant sur voirie sera dépénalisé et décentralisé. Les communes et les intercos vont fixer elles-mêmes le tarif des « forfaits de post-stationnement » ( FPS ), et directement encaisser les subsides. Aujourd’hui, en moyenne, seuls 35% des automobilistes s’acquittent spontanément du paiement sur un horodateur ! La plupart des grandes villes attendent avec impatience cette réforme qui va diminuer le trafic dans les rues et favoriser la rotation des voitures. Il faudra renforcer la surveillance pour que la réforme soit efficace. Avec ses 12 000 places de stationnement payant, la ville de Clermont-Ferrand (2 034 agents, 141 500 hab.) a choisi de s’appuyer « sur les compétences et le savoir-faire de ses vingt agents de surveillance de la voie publique [ ASVP ], précise Anne Peyridieux, directrice des services à la population et de la tranquillité publique. L’équipe est performante et sait faire face à différentes situations sur le terrain. »
A l’inverse, la ville de Bordeaux (3 150 agents, 243 600 hab.) va confier l’ensemble des missions liées au stationnement payant au prestataire Urbis park, dans le cadre d’un marché public de quatre ans qui comprend le contrôle par les agents de la société, l’émissions des FPS , la maintenance des horodateurs, etc. La direction des ressources humaines ( DRH ) a proposé des formations aux ASVP jusque-là chargés du contrôle, qui verront leurs missions évoluer. Elle a aussi animé des ateliers de rédaction de lettres de motivation et de préparation aux jurys pour accéder aux postes offerts par la ville ou la métropole.
Les délégataires n’attirent pas
Metz (2 550 agents, 118 600 hab.) va, quant à elle, déléguer le contrôle du stationnement à la société Streeteo, filiale d’Indigo park. « Actuellement, la moitié du temps de travail des 23 ASVP est dédiée à la surveillance du stationnement payant. Une reconversion est prévue, ou la possibilité de rejoindre les rangs du délégataire, sans perdre ni le statut ni l’ancienneté », nous précisait la ville en février. « Nous avons rencontré individuellement huit agents qui semblaient intéressés pour rejoindre nos rangs, avec la possibilité de revenir à la mairie à la fin du contrat, relate Thomas de Galard, responsable des RH de Streeteo. Néanmoins, in fine, aucun n’a accepté de venir. Nous leur proposons des conditions avantageuses, mais il y a une vraie crainte des ASVP à venir dans le privé. Même scénario à Nogent-sur-Marne [530 agents, 31 400 hab, Val-de-Marne], qui nous a confié la gestion du stationnement : les agents ont tous décliné notre offre. »
La ville de Rouen (2 176 agents, 110 800 hab.) déléguera toutes les missions liées au contrôle du stationnement payant de surface à la société publique locale ( SPL ) Rouen Normandie stationnement, via un contrat de concession de neuf ans. La direction de la tranquillité publique et la DRH ont proposé des conventions de mise à disposition des ASVP fonctionnaires à la SPL , pour trois ans, avec la conservation de leur statut. Mais les 24 ASVP concernés ont préféré s’orienter vers une évolution professionnelle par la mobilité interne. « Nous encourageons cette démarche, notamment par des périodes d’immersion et par un plan de formation adapté », commente Marie Neufville-Vossier, chef du service « pilotage de l’emploi, des compétences et de la masse salariale ».
Dès janvier, un ASVP a été accompagné pour devenir chargé d’accueil à l’hôtel de ville. Une autre est aujourd’hui jardinière. Neuf ASVP ont ainsi changé de service. Il reste six ASVP à affecter à d’autres missions d’ici un mois. Ils sont prioritaires pour tous les postes de catégorie C qui se libèrent à la mairie. « Par ailleurs, neuf ASVP resteront à la direction de la tranquillité publique : ils seront chargés du stationnement gênant, mais aussi de l’accès sécurisé aux écoles et de points de circulation lors de manifestations, avec les policiers municipaux », indique Guillaume Caron, directeur de la police municipale.
A Paris, de la préfecture à la ville
La fraude au stationnement payant atteint 90% à Paris (52 000 agents, 2,2 millions d’hab.) ! La capitale confiera la surveillance de ses 140 000 places payantes à deux prestataires privés. Les agents de surveillance de Paris ( ASP ), qui dépendaient de la ville mais étaient employés par la préfecture, vont rejoindre de facto les effectifs de la capitale au 1er janvier, en vertu de la loi de réforme du statut de Paris du 27 février 2016. « Nous allons récupérer entre 1 200 et 1 300 agents, explique Matthieu Clouzeau, directeur de la direction de la prévention, de la sécurité et de la protection à la ville de Paris. Leur statut sera le même qu’à la préfecture pendant un an, puis nous négocierons une nouvelle organisation pour 2019. »
Ces ASP auront pour mission de surveiller le stationnement gênant et de réguler les déplacements : contrôle du respect des voies piétonnes et pistes cyclables, des couloirs de bus, lutte contre la pollution émise par les véhicules… De nouvelles missions diversifiées, ce qui n’est pas pour déplaire aux agents.
Focus
Ratio ASVP – places de parking payant
Selon le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), il faut un ASVP pour surveiller entre 150 et 200 places de stationnement payant par jour. La commune peut définir le nombre d’ ASVP dont elle a besoin et le nombre de tournées qu’elle souhaite réaliser.
Focus
Une régie qui compte capitaliser sur les compétences et la polyvalence
Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) 2 034 agents 141 500 hab.
En 2015, Clermont-Ferrand a instauré vingt minutes de stationnement gratuites suite à toute prise d’un ticket. Les zones payantes ont été étendues. « 1 000 places de plus ont été créées en juillet ; la ville compte désormais 12 000 places payantes. L’effectif actuel de vingt ASVP sera maintenu », précise Anne Peyridieux, directrice des services à la population et de la tranquillité publique de la ville, qui a décidé de garder la surveillance en régie. Les terminaux numériques PDA étant obsolètes, la collectivité a commandé des équipements de géoverbalisation électronique au format d’un smartphone, qui feront gagner du temps aux agents. Quid de leur assermentation ? « Ils le sont déjà, et ceci reste valable pour l’émission des FPS « , l’un des intérêts de ne pas déléguer à un prestataire privé. « Les ASVP continueront à contrôler, de manière mutualisée, le stationnement payant et le stationnement gênant, ce qui sera plus efficace. » D’ici fin décembre, les vingt ASVP bénéficieront de jours de formation.
Contact: Anne Peyridieux, 04.73.42.63.71.
Focus
Qui traitera les recours administratifs préalables obligatoires ?
Autre incidence de la réforme sur l’organisation du travail dans les mairies : les fameux Rapo , recours administratifs préalables obligatoires, que pourront déposer les automobilistes et que devront traiter les collectivités. Les communes et intercos naviguent à vue sur leur nombre et leur temps de traitement. Clermont-Ferrand a prévu de recruter un adjoint administratif pour les gérer. A Honfleur (349 agents, 7 700 hab., Calvados), « une secrétaire déjà en poste va s’occuper de les traiter et de les transmettre à l’élue concernée », indique Henri Jarroux, chef du service de la police municipale. Dans les grandes villes, le recours à un prestataire peut être intéressant, car il pourra absorber les nombreux recours qui se manifesteront au début.
Focus
Les fonctionnaires déployés sur d’autres missions
[Bordeaux, Gironde, 3 150 agents, 243 600 hab.]
La ville de Bordeaux compte 57 ASVP , dont environ une moitié de contractuels. Leur contrat arrive à échéance fin décembre. « Une dizaine d’entre eux devrait rejoindre les effectifs d’Urbis park, indique Nicolas Andreotti, directeur de la tranquillité publique. Leur rémunération devra être au moins égale à celle qu’ils percevaient à la mairie, comme indiqué dans notre cahier des charges. Ils pourraient même toucher des primes en sus. »
En revanche, leurs horaires et jours de congés seront ceux de la branche professionnelle des transports. Une petite dizaine de contractuels a préféré mettre fin à leur contrat avant la fin 2017 pour se diriger vers des postes du privé (dans la sécurité) ou du public (dans la police nationale).
« Quant aux ASVP fonctionnaires, ils seront tous conservés par la mairie qui va les affecter à d’autres tâches : surveiller le stationnement gênant, mais aussi lutter contre l’insalubrité, signaler l’ensemble des désordres constatés sur le domaine public… Une nouvelle unité polyvalente va voir le jour : la brigade du stationnement gênant, vers laquelle seront dirigés seize ASVP actuels », précise Nicolas Andreotti.
Par ailleurs, six ASVP vont évoluer vers des postes d’agent de proximité dans les mairies de quartier. Une dizaine a été redéployée sur des postes de chargés d’accueil ou de travaux, d’opérateurs vidéo, d’agents de contrôle de la cellule des débits de boissons et de placiers (respect de la réglementation dans les bars, foires et marchés).
Contact: Nicolas Andreotti, 05.56.10.25.71.