Nouvel An : la grève des policiers municipaux ne devrait pas affaiblir la sécurité Analyse
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a annoncé vendredi 29 décembre que plus de 90 000 policiers et gendarmes seront mobilisés pour la nuit de la Saint Sylvestre. Comme à Noël, des policiers municipaux seront en grève pour des revendications statutaires et financières.
Comme chaque année, il y aura du « bleu » dans la rue lors de la nuit de la Saint Sylvestre : plus de 90 000 policiers et gendarmes, seront mobilisés dimanche 31 décembre pour sécuriser le passage à la nouvelle année. C’est ce qu’a annoncé ce vendredi le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin en ajoutant que 5 000 militaires de l’opération Sentinelle seront aussi sur le pont. Mais dans certaines communes, des policiers municipaux risquent de faire défection. Un appel à la grève a en effet été lancé par diverses organisations regroupées au sein d’un collectif de «policiers municipaux en colère».
Un esprit de responsabilité
Une première grève a eu lieu à Noël où, selon ces organisations, le mouvement a été suivi à environ 60 %. « Nous ferons de nouveau grève pour le 31 mais avec un esprit de responsabilité. Nous cesserons le travail dans les communes où les effectifs de policiers nationaux et de gendarmes seront suffisants », indique Thierry Colomar, président de la Fédération nationale des policiers municipaux. « Mais si dans certaines villes de moyenne importance, notre présence s’avère indispensable pour assurer la sécurité des citoyens, nous serons sur le pont », ajoute-t-il.
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L’objectif du mouvement est d’obtenir du gouvernement certaines avancées statutaires et financières. « Aujourd’hui, un policier municipal travaille jusqu’à 64 ans et touche, une fois à la retraite, entre 1 200 et 1 400 € par mois. Cela n’est pas acceptable quand on pense aux risques liés à nos missions », estime Frédéric Biédak, président du syndicat national des policiers municipaux. Avec cette grève, le collectif souhaite notamment obtenir la prise en compte des primes dans le calcul des pensions de retraite. Ces primes sont un élément important de la rémunération de ces policiers. « Il existe une grille salariale commune au niveau national pour tous les policiers municipaux. Il y a donc un salaire de départ, le même pour tout le monde, auquel s’ajoutent des primes versées par les mairies qui nous emploient », explique Thierry Colomar.
Mais toutes les communes ne versent le même niveau de primes. « Dans certains endroits, un policier va toucher entre 1 800 et 1 900 € par mois alors que dans d’autres communes, notamment en Paca ou en région parisienne, un policier faisant le même travail sera payé entre 1900 et 2 500 € », poursuit ce responsable. Ces écarts s’expliquent par la concurrence qui existe aujourd’hui entre les villes pour recruter des policiers. « Il y a un vrai mercato », reconnaît Thierry Colmar, en utilisant un terme d’ordinaire employé dans le monde du football.
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Les effectifs de ces agents n’ont cessé de croître depuis trente ans. « Si l’on comptait 5 600 policiers municipaux répartis dans 1 750 communes en 1984, on en totalisait plus de 18 000 en 2010 pour 3 500 communes et près de 23 934 en 2019 pour le même nombre de communes », notait le Cour des comptes dans un rapport de 2020. « Aujourd’hui, on recense 26 000 policiers employés par 4 500 villes pour un bassin de 50 millions d’habitants », indique Thierry Colomar, en précisant que toutes villes de plus de 100 000 habitants ont désormais leur police municipale. « À l’exception de Brest », souligne-t-il.
Des missions diverses
Avec cette grève, les policiers municipaux veulent aussi sensibiliser l’opinion à la diversité de leurs missions. « Au fil des ans, elles n’ont cessé d’être élargies. Par exemple, on nous demande de plus en plus de sécuriser des lieux de cultes comme les églises à Noël, indique Thierry Colomar. Nous pouvons intervenir pour des problèmes de stationnements gênants, du tapage nocturne mais aussi pour des différents familiaux, des cambriolages, des actes de délinquance sur la voie publique. Dans bien des cas, nous arrivons sur les lieux avant nos collègues de la police nationale ».
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De ce fait, il n’est pas rare que les policiers municipaux se retrouvent en première face à des terroristes. « En octobre 2020, ce sont des collègues de Nice qui sont intervenus dans la basilique (Notre-Dame de l’Assomption) de Nice pour neutraliser l’assaillant qui était armé d’un couteau. Toujours à Nice, la 14 juillet 2016, ce sont encore des policiers municipaux qui ont tiré sur le camion du terroriste sur la promenade des Anglais », constate Thierry Bédiak, en rappelant le cas de Clarissa Jean-Philippe, tuée le 8 janvier 2015 à Montrouge par Amedy Coulibaly qui, le lendemain, attaquera le magasin Hyper Cacher à Vincennes.
« Plus récemment au lycée d’Arras, le terroriste a pu être interpellé par deux policiers municipaux et deux policiers nationaux », complète Thierry Colombar, en ajoutant que lors des émeutes, cet été, de nombreux policiers municipaux ont été envoyés pour sécuriser des commissariats. Pour assurer ces missions, la très grande majorité des policiers municipaux sont dotées d’une arme. « Environ 60% d’entre nous ont une arme létale », précise Thierry Colombar
Pierre Bienvault