Près de Rouen, une “supérette à stupéfiants” mise à jour
Justice. Lors d’une banale opération de sécurisation des parties communes d’immeubles à Canteleu il y a quelques jours, des policiers sont tombés sur un commerce de stupéfiantstrès bien organisé.
Près de 27 000 € de bénéfices en quatre mois, plus de 300 clients. Nombre de commerçants aimeraient pouvoir se targuer d’un tel bilan. Ces chiffres, ce sont ceux avancés par Éric Dufossey aux enquêteurs qui l’entendent pour un trafic de stupéfiants dont on le soupçonne d’être à la tête du 1er mai au 6 septembre derniers à Canteleu, près de Rouen.
Cocaïne, héroïne… et des milliers d’euros
Alors qu’une patrouille de police fouille les sous-sols d’un immeuble de Canteleu, elle aperçoit un jeune homme fermer précipitamment la porte d’une cave et s’enfuir. Il est vite rattrapé et se laisse interpeller sans difficulté. Les forces de l’ordre lui demandent d’ouvrir la porte. Ce que les fonctionnaires découvrent alors les laisse sans voix. Cette découverte, c’est le procureur de la République qui en parle le mieux pendant l’audience, le 11 septembre : « C’est une vraie supérette, avec des balances, des présentoirs, 330 g de cocaïne, 414 g d’héroïne, 282 g de cannabis, 3 770 €, des sommes d’argent classés par type de produit, des tarifs dégressifs prévus. On se demande même s’il n’y avait pas de carte de fidélité. C’est une organisation à faire pâlir nombre de commerçants. Mais Éric Dufossey, lui, il vend de la mort et il en a abreuvé pendant cinq mois toute la région rouennaise ». Âgé de 27 ans, le prévenu explique qu’à la suite de sa sortie de prison le 10 avril, après une période de cinq ans de détention notamment pour violence avec arme, il a investi 8 000 € dans les stupéfiants et s’est fait prêter 20 000 € de marchandise par les trafiquants. Ce qui lui a permis de développer son trafic.
De la drogue cachée en forêt puis dans des caves
« Au début j’ai commencé à cacher la marchandise en forêt puis j’ai utilisé des caves inoccupées. J’en achetais de plus en plus. Je manquais d’argent, je m’étais fait des contacts en prison, je les ai utilisés. C’était de l’argent facile », explique le prévenu devant le tribunal. Il a le front plissé, un regard perçant. Il se contrôle parfaitement et ne laisse transparaître aucune émotion. La présidente s’étonne de la disparition des sommes perçues. « J’ai dépensé l’argent en filles et en sorties, tout ce dont je n’ai pas pu profiter pendant mes cinq ans de prison », se justifie l’homme.
À la question de la magistrate de ce qu’il pense de la vente de stupéfiants, il répond : « Ce n’est pas bien, ça fait du mal aux gens. Je n’aimerais pas que ma famille en consomme ». Lui qui n’a jamais été mêlé à une affaire de drogue comme l’explique la magistrate, il justifie qu’on lui ait confié « 20 000 € de marchandise d’entrée de jeu » selon les termes de la juge : « Je suis resté longtemps en prison, j’ai eu le temps de discuter avec mes contacts et de les mettre en confiance ».
L’avocat de la défense, Me Marceau, ne nie pas la « gravité » des faits mais met en avant qu’ils ont été « reconnus » par son client. « Il a été collaboratif dès son interpellation. Il n’a montré aucune trace d’arrogance envers les policiers, ce qui est rare dans les affaires de stupéfiant. La détention n’a été d’aucune utilité pour lui, mis à part pour le mettre en contact avec des trafiquants. Il en sera de même cette fois, si vous ne prononcez pas de mesures d’accompagnement », a poursuivi le conseil. Le prévenu a été condamné à cinq ans de prison, dont un an avec sursis.