Procès du meurtrier Elodie Bonnefille : «Beaucoup d’amertume et un gros gâchis»
Justice
Le jugement en irresponsabilité pénale du meurtrier d’Élodie Bonnefille a été mis en délibéré au 30 novembre prochain. La famille de la jeune fille tuée à Mayran en 2016 était hier à l’audience du tribunal de Montpellier.
Nouvelle épreuve, hier, pour la famille d’Élodie Bonnefille (cette jeune technicienne agricole de 26 ans assassinée à Mayran au matin du 17 février 2016 par un agriculteur chez qui elle effectuait un contrôle laitier) qui assistait à l’audience du tribunal de Montpellier chargé de statuer sur l’irresponsabilité pénale ou pas de son meurtrier.
La précédente audience du 28 septembre dernier avait tourné court car le coupable (Xavier Expinasse, 46 ans, qui a avoué son crime) n’avait pu être extrait de la maison d’arrêt de Toulouse-Seysse pour des loupés administratifs. Révoltés, car non prévenus de ce contretemps, les parents d’Élodie avaient refusé une confrontation par écran interposé. Même si l’avocate de la défense, Joana Elkaïm, ne semblait pas comprendre hier le bien-fondé de ce report car «la rencontre avec quelqu’un de fou ne peut pas se faire», la famille d’Élodie Bonnefille venue au complet (ses parents, ses frères, sa sœur), soutenu par son avocat Stéphane Mazars, a tenté d’interpeller Xavier Espinasse qui «n’a pas voulu communiquer» et qui est resté «prostré». Il s’est contenté de répéter : «Je ne sais pas, je ne me rappelle pas». Son avocate a expliqué qu’il n’est «pas accessible au débat. Il ne formule ni émotion, ni regret. Il est capable de dire ce qu’il a fait mais ne le comprend pas juridiquement».
Durant l’audience, qui a duré deux heures et demie, deux psychiatres sont intervenus par visioconférence pour expliquer la schizophrénie paranoïaque, dont est atteint le meurtrier, qui induit une abolition de son discernement. Le fait de voir le meurtrier de leur fille, de leur sœur, d’écouter le discours des psychiatres, a permis à la famille de mieux appréhender l’état délirant de Xavier Espinasse qui a toujours des hallucinations et continue d’entendre des voix malgré les lourds traitements psychotiques auxquels il est assujetti depuis un an et demi. Le plus choquant pour Myriam Bonnefille, la maman d’Élodie, c’est de savoir que sa maladie avait été diagnostiquée en 2007. Un médecin lui avait prescrit un traitement qu’il s’est contenté de prendre seulement quelque temps. Lui-même aurait reconnu qu’il était mieux avec des médicaments. «Tout ça parce qu’on ne peut pas contraindre quelqu’un à prendre des médicaments si on ne le juge pas dangereux pour la société». Il n’avait jusque-là rien fait de mal et un passage à l’acte n’avait pas été anticipé. «De 2007 à 2016, il s’est tenu tranquille, il n’a pas fait parler de lui, il était considéré comme quelqu’un de solitaire mais normal. Maintenant on reconnaît sa dangerosité au niveau psychologique et sa potentialité criminologique qui pourrait se reproduire mais c’est trop tard. C’est un gros gâchis. J’ai beaucoup d’amertume».
«Il ne sortira pas»
Maintenant le combat de Myriam Bonnefille et de toute sa famille c’est de s’assurer que ce criminel soit enfermé pour longtemps. Fort des constatations des experts, un internement se profile mais sans que l’on quantifie la durée exacte. Néanmoins, une éventuelle sortie ne serait décidée qu’après avis convergent de deux experts psychiatres et validation par un juge. «Moi vivante, il ne sortira pas, je m’y opposerai et mes enfants après moi», confie Myriam Bonnefille.
Si l’agriculteur est déclaré irresponsable pénalement il sera placé aussitôt en hôpital psychiatrique alors qu’il est simplement en unité psychiatrique de la prison actuellement. Stéphane Mazars a demandé une interdiction du département de l’Aveyron alors que Joanna Elkaïm souhaite au contraire qu’il soit interné dans un établissement aveyronnais afin qu’il puisse reprendre contact avec sa famille. «Pourquoi ?» s’insurge Myriam Bonnefille, «sa famille n’était pas à l’audience et elle n’est jamais venue le voir».
Le délibéré a été fixé au 30 novembre mais l’issue ne semble pas faire de doute.
Pétition
La famille d’élodie Bonnefille a lancé une pétition pour contester le statut d’irresponsabilité pénale. Mais si la folie est bien avérée, il s’agit aussi d’éviter que des drames comme celui-ci se reproduise en ne laissant pas des malades mentaux potentiellement dangereux dans la nature. Cette pétition, qui a déjà recueilli 5 706 signatures, veut alerter l’opinion publique avant d’être remise au ministère de la Justice.
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