Trente ans de réclusion pour un sextuple meurtre
La cour d’assises du Rhône a condamné à 30 ans de réclusion un homme de 35 ans qui, en 2015 avait tué sa femme, quatre de ses enfants et un de ses frères. La question de la folie était au centre des débats.
«Si j’aurais (sic) continué mon traitement, peut-être que tout cela ne serait pas arrivé.» C’est ce que cet homme, accusé d’avoir tué six membres de sa famille, a déclaré hier à Lyon, avant que la cour ne se retire. Yassine Mechta a été condamné vendredi à trente ans de réclusion, dont deux tiers incompressibles Après moins de trois heures de délibéré, la cour a suivi l’avocat général Charlotte Millon pour qui le discernement de Yassine Mechta, 35 ans, était «altéré» au moment des faits, et non «aboli» comme le soutenait la défense.
Entre le 28 novembre et le 3 décembre 2015, dans cet appartement du 8e arrondissement de Lyon, Yassine Mechta a battu puis poignardé Caroline, sa compagne de 32 ans, avant de donner des coups de couteau à quatre de leurs enfants, âgés de 5 mois à six ans. Il s’était par la suite rendu chez son frère Djamel Mechta, 49 ans, dans un foyer social près de Lyon, et l’avait également poignardé.
Alors, folie furieuse ? La maladie peut-elle expliquer les meurtres par Yassine Mechta de six membres de sa famille ? Non pour l’avocate générale qui réclamait trente ans de réclusion ; oui pour la défense qui plaidait l’irresponsabilité.
«La maladie ne vaut pas permis de tuer», a lâché l’avocate générale.
Abolition du discernement ?
«Ses passages à l’acte ont été facilités par la maladie psychique» mais il «n’était pas en dehors de lui-même», a soutenu Mme Millon, qui a requis également un suivi socio-judiciaire avec injonction de soins pendant trente ans et le retrait de l’autorité parentale de l’accusé sur son fils aîné, seul rescapé du massacre.
«La maladie n’excuse pas tout mais (reconnaître) l’abolition du discernement, ce n’est pas l’acquittement, c’est une déclaration d’irresponsabilité pénale, c’est l’hospitalisation d’office sous contrainte», a plaidé l’avocate de la défense, Me Marina Stefania, pour qui «le crime se punit mais la folie se soigne».
L’accusé, violent depuis de nombreuses années sur sa compagne, consommant quotidiennement «15 à 20 bières», du whisky et «10 à 15 joints», n’a pas expliqué les raisons de son geste.
«Dans cette affaire, on n’est pas loin de l’abolition du discernement mais on n’y est pas», avait tranché jeudi un expert psychiatre, le Dr Jean Canterino, estimant que les troubles schizophréniques du père de famille avaient été aggravés par ses addictions. Extrêmement jaloux, il vivait dans la «peur» irrationnelle que sa compagne, enceinte de moins d’un mois, le quitte.
Et le médecin d’ajouter : «Il y avait quelque chose d’inéluctable car Yassine Mechta m’a dit qu’il avait pensé la veille» à tuer la jeune femme…
Déjà condamné
Condamné à deux reprises en 2006 et 2012 pour violences sur sa compagne, il avait écopé de 30 mois de prison, dont 15 avec sursis assortis d’une mise à l’épreuve de trois ans et d’une obligation de soins qu’il n’avait pas respectée. Malgré tout le couple avait repris sa vie commune. En 2014, Yassine Mechta avait été hospitalisé en psychiatrie à la demande d’un de ses frères, parce qu’il «entendait des voix». Il était ressorti, quinze jours plus tard, avec un traitement antipsychotique, qu’il avait toutefois «rapidement arrêté». De nouveau en proie à un «sentiment de persécution», en août 2015, il avait fait un bref passage à l’hôpital psychiatrique du Vinatier, près de Lyon, et en était ressorti à sa demande.