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Un an après, où en sont les réfugiés accueillis en Occitanie ? (1/2)

Un an après, où en sont les réfugiés accueillis en Occitanie ? (1/2)
Hekmat Alassad imaginait qu’il aurait un appartement et que ses enfants iraient à l’école.

CHRISTOPHE FORTIN

Il y a un an tout juste, quelques mois plus tôt, quelques mois plus tard, ils arrivaient sur le quai d’une gare à Nîmes, Béziers, Montpellier. Najibeh, Hekmat, Jano, Bahareh, Fidan, Jamal, Kadija… Midi Libre les avait alors rencontrés. Que sont-ils devenus ?

L’année dernière, l’heure était à la grande mobilisation dans les associations, les communes, les services de l’Etat. Nous les avons retrouvés alors que la situation des réfugiés, moins médiatisée, continue d’amener des migrants dans la région. Cette semaine encore, ce sont treize jeunes Syriens qui sont arrivés en Occitanie pour étudier dans les facultés de Toulouse et Montpellier.

Depuis, Vrej et Jamal ont trouvé du travail. Mari soigne son dos. Les enfants vont à l’école. Un quotidien s’organise, pas toujours facile, dans un univers qui rompt avec des mois de galère et le vocabulaire de l’exil, “dublinage”, “relocalisés”, “réinstallés”, ses sigles, cada, Offi. Les soutiens, la Cimade, Welcome, Dany, Jacqueline, Nicole, Anne… sont restés. Un an après, paroles de réfugiés.

Interpellé par Ménard, Hekmat est resté à Béziers

« Monsieur, vous n’êtes pas le bienvenu (…) Vous volez l’eau et l’électricité (…)” La sortie de Robert Ménard, ceint de son écharpe de maire, passant d’un logement à l’autre dans le quartier de la Devèze, haranguant les réfugiés, accompagné d’un traducteur et de la police municipale armée, filmée le 11 septembre 2015, totalise près de 700 000 vues sur YouTube. Quelques semaines plus tôt, seize familles syriennes étaient arrivées à Béziers.

Le 4 octobre 2017, Hekmat Alassad, l’homme interpellé par Robert Ménard à son arrivée dans la cité, est toujours là, dans cet appartement insalubre meublé de quelques tapis, deux matelas, une petite télé, un réchaud électrique usé, un salon en cuir si imposant qu’il en est indécent, un dessin d’enfant.

Hekmat Alassad, 24 ans, a obtenu ses papiers de réfugié en février dernier – son titre de séjour expire le 20 février 2027 – comme la plupart de ceux qui l’accompagnaient à la Devèze, en grande partie sa famille proche. Mais son épouse et leur petite fille sont désormais à Montpellier. Le père, les trois frères et la sœur d’Hekmat, à Toulouse. Malgré des allers et retours incessants pour les retrouver, il n’y a pas de place pour l’accueillir là-bas.

Aller en Angleterre

“Je vais de la Devèze au Polygone, du Polygone à la gare, de la gare à Auchan”, se désole Hekmat Alassad, qui ne se voit pas d’avenir. Il peut être chassé à tout moment de l’appartement. Lui qui rêvait de gagner l’Angleterre raconte cinq ans d’errance dans un anglais délié, la même histoire que celle déposée à l’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, à Paris.

Né à Homs, Hekmat Alassad, commerçant, a fui Damas après que le pouvoir en place a tenté de l’enrôler dans l’armée, “je ne voulais pas tuer mes voisins, mes amis”, dit-il. “Torturé”, il est libéré en échange de 20 000 dollars, son père s’acquitte de la somme, la famille quitte le pays. Ils s’enfuient d’Égypte après l’arrivée de Morsi au pouvoir, quittent l’Algérie sous la pression policière, gagnent le Maroc à pied, en bus. À Tétouan, Hekmat et son épouse pensent trouver un havre de paix pour faire naître leur bébé. Il faut encore payer pour l’accouchement, l’enfant, atteint d’une grave maladie, est évacué en Espagne, à Cadix puis à Séville, avec sa mère. Le petit y est encore, on leur a promis qu’il les rejoindra ailleurs en Europe, en Allemagne, en Angleterre, où ils pourront faire leur vie.

“On s’est arrêté en France, je n’avais pas d’argent pour aller plus loin”, rapporte Hekmat, qui souhaiterait avancer plus vite désormais. Autour de lui, on s’interroge : “Monsieur Alassad, pourquoi vous ne parlez pas français ?” Il rapporte les interrogations des services d’aide sociale qui l’accompagnent. “Ici, tu dis “bonjour”, on répond “salam””, regrette-t-il. Pôle emploi l’enjoint à suivre des cours de langue, la porte vers un travail. Il tergiverse, pris entre la nécessité d’aller de l’avant et la crainte de rester dans une ville où il ne veut rien entreprendre. Tout avait mal commencé : “Vous n’êtes pas les bienvenus…”

Devenir indépendants

Les manifestations de solidarité des Biterrois, dans la foulée, n’ont pas suffi. À l’association Cultures solidaires, Omar Khatiri, très actif dans le collectif venu en aide aux seize premières familles arrivées à Béziers, plus dubitatif sur l’urgence humanitaire de situations ultérieures, fait état d’un malentendu : “On les a suivis jusqu’à l’Office français de l’immigration et de l’intégration, “l’Offi”, on les a mis en relation avec les services d’aide, on les a inscrits aux Restos du cœur, au Secours populaire… Puis on a pris du recul pour qu’ils prennent leur indépendance, beaucoup l’ont compris.”

Hekmat Alassad se sent “seul”, un peu perdu. Il “imaginait que la France, ce serait différent”. Qu’il aurait un appartement, que ses enfants iraient à l’école, qu’ils parleraient français. La déception est grande, un malentendu.

Lire la suite de notre dossier – Réfugiés en Occitanie : la nouvelle vie de trois familles (2/2)

Etat des lieux dans les différents départements

La situation des réfugiés est suivie par les préfectures, qui font preuve d’une réactivité et d’une capacité de communication variable. Le département de l’Aveyron accueille soixante-treize réfugiés, soit quatorze familles et deux mineurs isolés à Rodez, Decazeville, Millau, Naucelle, Centrès, La Couvertoirade, Saint-Affrique, Conques.

La Lozère accueille vingt-quatre réfugiés, Érythréens et Syriens, à Mende, Marvejols, Barre-des-Cévennes, Saint-Germain-de-Calberte. Dans le Gard (chiffres 2017), douze familles ont été accueillies (soixante-dix personnes), dans neuf communes.

Dans l’Hérault, le nombre de réfugiés relocalisés est de vingt-neuf personnes. Il s’agit de familles (seize adultes et treize enfants). Les réfugiés installés sont eux au nombre de vingt-trois personnes. Ils sont accueillis sur les communes de Bédarieux, Castelnau-le-Lez, Clapiers, Lodève, Lunel-Viel, Lunel, Marseillan, Montarnaud, Saint-Christol et Saint-Martin-de-Londres.

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