Un clan de pickpockets roumains qui détroussaient des touristes devant la justice
Ils envoyaient leurs enfants faire les poches des touristes étrangers aux abords de Disneyland Paris : sept femmes et cinq hommes, la plupart de nationalité roumaine, sont jugés à partir de mardi pour leur implication présumée dans un réseau criminel à base clanique et familiale.
Dix des prévenus, qui appartiennent au même clan, devront répondre devant le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne) des faits commis entre 2014 et 2016 de vol en bande organisée, recel et blanchiment, ainsi que d’incitation de mineurs à commettre des délits et délaissement de mineurs de moins de quinze ans.
L’enquête démarre en mars 2015 quand le commissariat de Chessy, en Seine-et-Marne, constate une forte augmentation des vols à la tire par de jeunes roms aux abords de Disneyland Paris et dans le RER A desservant le parc d’attraction, mais aussi dans le centre commercial du Val d’Europe, une zone très fréquentée par les touristes.
« Les mineurs agissaient en milieu d’après-midi, par groupe de trois au quatre: le premier détournait l’attention, le deuxième en profitait pour faire les poches et le troisième faisait disparaître le bien volé », avait expliqué le commissaire Jérôme Georges.
Au total, le préjudice, constitué de devises, de maroquinerie de luxe, de téléphones et bijoux, est estimé à un million d’euros. Au bas mot, car beaucoup de victimes étrangères n’ont pas déposé plainte. Un millier de vols ont été comptabilisés sur six mois.
La police a beau procéder à des interpellations, elles restent sans effet: les mineurs donnent à chaque fois une fausse identité, refusent d’apposer leurs empreintes et, placés dans des foyers, ont tôt fait de s’enfuir pour pouvoir recommencer à voler.
L’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), qui prend le relais des investigations avec le concours des autorités roumaines, parvient toutefois à démanteler le réseau en février 2016.
un patriarche craint
A la tête du clan, originaire de la ville roumaine de Craiova et formé de huit branches familiales, Marian Tinca, le « patriarche », 57 ans, et son ex-femme, Maria Iamandita, 51 ans, qui comparaissent détenus comme d’autres membres du clan.
D’après les écoutes téléphoniques, le patriarche félicite ou réprimande, et peut se montrer violent quand les butins sont trop maigres. La matriarche s’occupe de réguler l’argent au profit du clan et d’envoyer des mandats cash vers la Roumanie. Sur place, l’argent est réinvesti par ses différents membres dans l’achat d’appartements, de terrains et de voitures.
Tout le clan, dont aucun membre n’a de revenu déclaré, est mis à contribution: les grands frères et grandes sœurs des mineurs voleurs sont ainsi chargés de surveiller qu’ils s’acquittent bien de leur mission et remettent l’argent volé.
Âgés de 12 à 17 ans, les sept mineurs impliqués, qui opéraient également sur les Grands Boulevards et la ligne 9 du métro parisien, ont eux déjà été jugés par le tribunal des enfants. Parmi eux, une jeune fille décrite comme particulièrement habile, qui rapportait entre 500 et 800 euros chaque jour à sa famille. Elle avait été mise en cause 48 fois dans des procédures pour vol.
Outre les dix membres du clan, le gérant d’un hôtel à Pantin (Seine-Saint-Denis), qui percevait des loyers en liquide, est renvoyé pour blanchiment, ainsi que son père. Un restaurateur chinois de Pigalle, à qui les enfants remettaient l’argent pour éviter de se faire prendre avec des espèces sur eux, est poursuivi pour sa part pour recel.
Le jugement est attendu vendredi. Certains des prévenus risquent jusqu’à 30 ans de réclusion.