Violences sexuelles : le conseil des ministres examine le projet de loi
VIDÉO. Le texte doit permettre de mieux lutter contre le harcèlement et les violences sexuelles et sexistes. Son contenu ne fait toutefois pas l’unanimité.
SOURCE AFP
Amende contre le harcèlement de rue, le consentement sexuel fixé à l’âge de 15 ans… Le projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes doit permettre une meilleure lutte contre les violences faites aux femmes, notamment, et est présenté ce mercredi en conseil des ministres. L’élaboration du texte avait été prévue bien avant l’affaire Weinstein, mais celle-ci a apporté une nouvelle dimension, une résonance particulière au projet de loi, en raison notamment de la vague de témoignages de femmes qui affirment avoir été victimes de violences. Une vague qui déferle sur les réseaux sociaux depuis l’automne dernier.
Mais le contenu de ce projet de loi ne fait pas l’unanimité. La décision de fixer à 15 ans l’âge en dessous duquel un mineur ne pourra pas être considéré comme consentant à une relation sexuelle avec un majeur – permettant des poursuites pour agression sexuelle, ou viol s’il y a eu pénétration – inquiète les magistrats. Leurs principaux syndicats ont mis en garde contre « des condamnations automatiques » qui découleraient d’une « présomption de culpabilité ». La secrétaire d’État Marlène Schiappa (Égalité femmes-hommes), qui portera le texte, accompagnée de la ministre de la Justice Nicole Belloubet, assure de son côté que « les magistrats garderont leur pouvoir d’appréciation ».
L’infraction d’« outrage sexiste » pénalisée jusqu’à 750 euros d’amende
« S’ils constatent l’existence d’une histoire d’amour entre deux personnes de 14 et 18 ans, ils pourront abandonner les poursuites », assurait récemment Marlène Schiappa dans Le Monde. Le texte dit qu’au-dessous de 15 ans tout acte de pénétration sexuelle constituera un viol « lorsque l’auteur connaissait ou ne pouvait ignorer l’âge de la victime », précisait-elle. Cet âge a été retenu par le gouvernement au regard des conclusions d’un comité d’experts (juristes, médecins, professionnels de l’enfance), qui ont voulu « poser clairement l’interdit de toute atteinte sexuelle sur un mineur de 15 ans par un majeur ». Dans deux affaires très médiatisées ces derniers mois, des fillettes de 11 ans avaient été considérées comme consentantes par la justice.
Conformément aux propositions d’un rapport parlementaire sur le harcèlement de rue, le gouvernement a par ailleurs décidé de créer une infraction d’« outrage sexiste » pouvant être sanctionnée d’une amende de 4e classe – allant de 90 à 750 euros – pour les comportements déplacés. En réponse aux critiques sur les difficultés d’appliquer une telle loi, Marlène Schiappa défend sa valeur « pédagogique ». Pour prévenir la récidive, la secrétaire d’État s’est par ailleurs déclarée favorable à un stage de sensibilisation à l’égalité femmes-hommes, qui serait « à la charge du harceleur qui aura été verbalisé en flagrant délit ».
Un délai de prescription allongé pour les crimes sexuels
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes souhaite pour sa part davantage de sévérité. Dans une contribution publiée lundi, il préconise d’étendre l’« agissement sexiste » prévu dans le Code du travail à tous les espaces publics, et de le sanctionner d’une amende de 5e classe allant jusqu’à 1 500 euros (3 000 euros en cas de récidive, en plus d’un stage de responsabilisation). Le projet de loi doit en outre allonger à trente ans après la majorité de la victime, contre vingt ans actuellement, le délai de prescription des crimes sexuels commis à l’encontre des mineurs.
Cet allongement avait été recommandé début 2017 par une mission coprésidée par un magistrat et par l’animatrice Flavie Flament, qui avait révélé avoir été violée dans son adolescence. La secrétaire d’État à l’Égalité femmes-hommes a récemment annoncé un quatrième volet dans le projet de loi visant à « renforcer les condamnations » en matière de cyberharcèlement, dont sont particulièrement victimes les femmes. Elle a précisé qu’une sanction pourrait intervenir à la moindre participation à « un phénomène de meute », c’est-à-dire lorsque plusieurs personnes s’organisent pour harceler ensemble sur Internet une même victime.