Violences sexuelles. Le monde de l’athlétisme dans la tourmente
L’athlétisme est mal en point. Deux entraîneurs français d’athlétisme sont soupçonnés de violences sexuelles. La justice a ouvert deux enquêtes. De son côté, la FFA a saisi sa commission de discipline qui s’est réunie aujourd’hui. Cerise sur le gâteau : une plainte, déposée il y a neuf mois, vient d’être retrouvée. Le point.
1er avril dernier. Le Monde dévoilait dans ses colonnes une information qui allait faire trembler le monde de l’athlétisme tricolore : deux entraîneurs français sont soupçonnés de violences sexuelles. Le choc, l’indignation. Deux jeunes athlètes avaient porté plainte à leur égard, l’une pour agression sexuelle, l’autre pour viol. La justice a aussitôt ouvert deux enquêtes.
Jour de commission et oubli de plainte…
De son côté, la Fédération française d’athlétisme (FFA) a saisi sa commission de discipline, indépendante, qui s’est réunie aujourd’hui pour l’un d’eux. « Elle s’est réunie à huis clos. Nous ne savons pas où. La délibération est en cours, informe la fédération. Nous n’aurons pas d’informations de suite quant au résultat. Il sera envoyé sous huit jours, par lettre, à la jeune femme qui a porté plainte. » Celle-ci pourra faire appel de la décision.
Nouveau rebondissement, hier. Selon des révélations de France Info, une plainte pour viol contre l’un des deux entraîneurs a été oubliée pendant neuf mois… Celle-ci avait été déposée par une athlète le 19 juin dernier au commissariat de Créteil. La jeune femme avait accusé le coach de trois viols, qui auraient été commis entre « avril et juillet 2016 ».
Ce n’est que le mois dernier, lorsque d’autres témoignages ont été recueillis à la décharge de cet entraîneur, que la plainte a été retrouvée. « La plainte n’a pas été mise de côté parce qu’elle dérangeait. C’est juste une grosse boulette de la collègue, avoue un policier. La plaignante évoque des faits graves et qui auraient été réitérés. Et je ne parle même pas du cadre singulier et des personnalités impliquées. Évidemment que cette affaire aurait dû remonter. »
« C’est un gros couac, il n’y a aucun doute là-dessus, complète un enquêteur. Mais les faits de viol ne sont pas toujours clairs et leur qualification est parfois difficile à établir. »
Image salie et relation coach-sportif non excusable
Face à cette affaire, qu’elle se prend de plein fouet, la FFA va renforcer son plan de prévention et « nommer des correspondants éthiques dans chaque région », informe son directeur général,Frédéric Sanaur. Objectif : « éviter qu’il y ait d’autres victimes. » Surveiller, éveiller les consciences et inciter à parler. Et de poursuivre : « Nous serons réellement intransigeants sur les valeurs que les acteurs de l’athlétisme doivent porter. » Des valeurs mises à mal par ces deux entraîneurs qui viennent salir l’image de ce sport. L’athlétisme, déjà touché par des affaires de dopage, n’en avait pas besoin.
Ces faits présumés ne sont pas sans rappeler l’affaire Larry Nassar, l’ancien médecin de l’équipe américaine de gymnastique, condamné en janvier dernier à plus de 40 ans de prison (150 jeunes filles avaient témoigné à son procès). Le sport est un milieu où le rapport au corps est particulier et un terreau propice à la promiscuité coach-sportif. « Mais, note-t-il, si la relation coach-athlète est « proche », elle doit l’être uniquement concernant la performance ! » Et de clore : « Il y a des lois, le respect des personnes. On ne peut pas expliquer l’inexplicable. »
L’un des deux entraîneurs visés s’expliquait, il y a quatre jours dans L’Équipe, niant les faits rapportés : « Cette accusation est fausse. Je suis innocent. La plaignante, je l’ai connue en dehors de l’athlé, on a échangé beaucoup de choses, on a été très proches, je ne dis pas le contraire. Mais je ne l’ai jamais violée. Je ne l’ai jamais contrainte ni obligée. On essaie de me faire dire des choses : est-ce que tu as eu un rapport ? Est-ce que tu l’as caressée ? Je ne l’ai jamais contrainte à rien du tout. »